D'origine méconnue, l'enquête [essai]

Publié le par Philippe Mangion

Je suis un Pied-Noir de la deuxième génération, fabriqué en Afrique du Nord et né à Toulouse en 1962. Mes parents étaient des « Français de Tunisie » aux origines multiples. Mais de la Tunisie je ne savais rien. C’était un pays imaginaire. Les conversations familiales ne sortaient pas des anecdotes et de la nostalgie. Un peu honteux d’être fils de colons, je n’étais pas curieux d’en apprendre plus. Quant à mes origines multiples, Malte, Italie, Normandie, Lorraine, je n’en connaissais ni le détail ni même la réalité, mais il me plaisait de m’en vanter.

En 2009, j’ai rompu avec ma famille. La petite musique tunisienne, coulant des conversations comme l’eau fraîche d’une gargoulette, s’est tarie brutalement. La Tunisie s’est effacée de mon imaginaire.

Dix ans plus tard, travaillant à une biographie de l’anarchiste Louise Michel, je lisais le récit d’une tournée de conférences qu’elle effectua en Algérie. Je fus surpris d’apprendre qu’elle y fut reçue par des groupes de libres penseurs, anarchistes et antimilitaristes.

Je n’imaginais pas que de telles idées puissent circuler en Afrique du Nord. Cette découverte a entraîné une multitude d’autres questions. Bien qu’ayant baigné une grande partie de ma vie dans la « tunisianité », je n’avais pas de réponses.

Je ne savais même pas quand et comment la Tunisie avait été conquise par les Français. Je ne savais pas non plus quand et pourquoi mes ancêtres s’y étaient installés.

Ainsi, je me suis lancé dans une double enquête, historique et familiale. Le XIXe siècle, chamboulé par les révolutions et les guerres autant que par le progrès industriel, a connu un flot de migrations, en Europe et en Méditerranée, d’une intensité inconnue jusqu’alors. Mes ancêtres ont été pris dans ce flot, du côté des victimes comme du côté des colons. Cet essai retrace leur histoire.

Publié dans D'origine méconnue

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